"Péguy nous dit de ne jamais désespérer" (Lonsdale)

Le 26/02/2015

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Le célèbre comédien Michael Lonsdale offre sa voix aux mots, aux vers de Péguy dans le spectacle "Péguy, entre ciel et terre", joué actuellement au théâtre de Poche Montparnasse à Paris. Il a accepté de répondre aux questions de l’Amitié Charles Péguy, sur ce spectacle, et plus largement sur son attachement au poète. Interview.










Amitié Charles Péguy : Comment avez-vous découvert Péguy ?


Michael Lonsdale : C’était il y a longtemps, j’avais 18-20 ans. J’habitais dans le Midi à Cannes, j’arrivais d’Afrique, je ne connaissais rien. Et c’est mon oncle, Marcel Arland, qui m’a dit : 'il faut que tu lises Claudel, Péguy'… C’est donc comme ça que je l’ai découvert, il y a longtemps. J’ai lu le Mystère de la Charité de Jeanne d’Arc. J’ai lu aussi Eve, L’argent… Et depuis, j’ai gardé une attention pour cette œuvre. Quand je participais à des soirées de poésie, je prenais très souvent un texte de Péguy.


 


Amitié Charles Péguy: Vous donnez depuis plusieurs mois un spectacle intitulé "Péguy, entre Ciel et Terre". Comment vous est venue l’idée ?


Michael Lonsdale : C’est Pierre Fesquet qui m’a sollicité pour ce spectacle. Nous étions à Orléans avec Marie-Christine Barrault. Nous avons fait une "soirée Péguy". La sélection des textes a été faite par Pierre Fesquet. Et moi, j’ai lu ce qu’il m’a demandé de lire.






Amitié Charles Péguy : Comment s’explique le succès de votre spectacle ? Est-ce l’œuvre de Péguy ? Est-ce la voix de Lonsdale ?


Michael Lonsdale : C’est évidemment Péguy qui attire. C’est prodigieux ce qu’il a pu pressentir du monde. Quand il parle du père de famille, de la corruption, de l’argent… C’est incroyable. On dirait que cela se passe aujourd’hui. 






Amitié Charles Péguy : C’est ça qui rend la pensée de Péguy d’actualité ?


Michael Lonsdale : Oui ! Je crois, au fond, que Péguy donne des raisons d’espérer dans un monde démoralisé. Et c’est vrai : il a écrit un très long texte dans lequel il interroge : "mais qu’est-ce qui se passe ? Dieu nous abandonne..." Il y a une espèce de longue plainte. Et Péguy se réfugie dans l’espérance. Ce qu’il écrit sur le sujet est d’une beauté ! Il nous dit qu’il ne faut jamais désespérer. C’est un message très contemporain. Vous savez, les poètes sont souvent hors de leur temps. C’est comme Victor Hugo qui a pressenti des choses incroyables à propos de l’industrie. Les grands poètes sont porteurs d’un temps qui n’est pas mesuré. Ils sont en avance sur leur temps, par inspiration…






Amitié Charles Péguy : Vous êtes profondément croyant. Est-ce que la foi de Péguy vous touche, et si oui, de quelle manière ?


Michael Lonsdale : Oui, je suis touché par sa foi, profonde et atypique. Péguy n’était pas un homme d’Eglise. Il n’allait pas à l’église. Il était en rupture avec l’Eglise. Il dit d’ailleurs des choses pas très justes sur les moines, estimant qu’ils ne comprennent rien à rien. Mais peut-être n’a-t-il pas eu l’occasion de rencontrer de grands spirituels. Il est un peu cavalier seul. En tout cas, il aime le Christ, et c’est ça qui compte surtout.






Amitié Charles Péguy : Qu’est-ce que vous ressentez quand vous lisez ces textes ?


Michael Lonsdale : Je ressens un grand plaisir car d’abord, c’est une belle langue. Ensuite, sa pensée est très attachante, elle est révolutionnaire. Il a tout pour me contenter et me rendre heureux.






Amitié Charles Péguy : Quel est votre œuvre, votre texte préféré ?


Michael Lonsdale : Je crois que c’est son texte sur l’espérance (Le Porche du Mystère de la deuxième vertu, NDLR). C’est très beau, très grand !






Amitié Charles Péguy : A quel public s’adresse ce spectacle ?


Michael Lonsdale : Il s’adresse à tout le monde. Aux croyants, évidemment, mais plus largement à tous ceux qui sont touchés par la poésie, qui aiment la poésie. D’après ce que je vois, ce spectacle plaît au public. Tant mieux ! Je crois qu’on a rempli notre petite mission…






Propos recueillis par Olivier Péguy





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